lunes, 19 de octubre de 2020

Rimbaud

Sueño de invierno


En el invierno viajaremos en un vagón de tren
con asientos azules.
Seremos felices. Habrá un nido de besos
oculto en los rincones.
Cerrarán sus ojos para no ver los gestos
en las últimas sombras,
esos monstruos huidizos, multitudes oscuras
de demonios y lobos.
Y luego en tu mejilla sentirás un rasguño...
un beso muy pequeño como una araña suave
correrá por tu cuello...
Y me dirás: "¡búscala!", reclinando tu cara
-y tardaremos mucho en hallar esa araña,
por demás indiscreta.

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Cabeza de fauno

 En la enramada que, florecida e incierta,
es verde estuche de oro recamado
de flores donde duerme el beso, alerta
y mirando el primor de su bordado,

sus ojos alocados el fauno ostenta;
muerden sus dientes en la flor de llamas,
y como un vino añejo es su sangrienta
boca al sembrar sus risas entre ramas.

Deja, al huir como la ardilla adusta,
perlerías de risa en cada hoja,
y hace que, atento a un vuelo que le asusta,
con su áureo beso el bosque se recoja.

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 Le Bateau Ivre
Arthur Rimbaud (1854-1891)

Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentais plus tiré par les haleurs:
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

J'étais insoucieux de tous les équipages,
Porteur de blés flamands et de cotons anglais.
Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages
Les Fleuves m'ont laissé descendre où je voulais.

Dans les clapotements furieux des marées,
Moi, l'autre hiver, plus sourd que les cerveaux d'enfants,
Je courus ! Et les Péninsules démarrées
N'ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.

La tempête a béni mes éveils maritimes.
Plus léger qu'un bouchon j'ai dansé sur les flots
Qu'on appelle rouleurs éternels de victimes,
Dix nuits, sans regretter l'oeil niais des falots!

Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème
De la Mer, infusé d'astres, et lactescent,
Dévorant les azurs verts; où, flottaison blême
Et ravie, un noyé pensif parfois descend;

Où, teignant tout à coup les bleuiés, délires
Et rythmes lents sous les rutilements du jour,
Plus fortes que l'alcool, plus vastes que nos lyres,
Fermentent les rousseurs amères de l'amour!

Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes
Et les ressacs et les courants: Je sais le soir,
L'aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes,
Et j'ai vu quelques fois ce que l'homme a cru voir!

J'ai vu le soleil bas, taché d'horreurs mystiques,
Illuminant de longs figements violets,
Pareils à des acteurs de drames très-antiques
Les flots roulant au loin leurs frissonsde volets!

J'ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
Baiser montant aux yeux des mers avec lenteurs,
La circulation des sèves inouïes
Et l'éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs!

J'ai suivi, des mois pleins, pareilles aux vacheries
Hystériques, la houle à l'assaut des récifs,
Sans songer que les pieds lumineux des Maries
Pussent forcer le mufle aux Océans poussifs!

J'ai heurté, savez-vous, d'incroyables Florides
Mêlant aux fleurs des yeux des panthères à peaux
D'hommes ! Des arcs-en-ciel tendus comme des brides
Sous l'horizon des mers, à de glauques troupeaux!

J'ai vu fermenter les marais énormes, nasses
Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan!
Des écroulement d'eau au milieu des bonacees,
Et les lointains vers les gouffres cataractant!

Glaciers, soleils d'argent, flots nacreux, cieux de braises!
Échouages hideux au fond des golfes bruns
Où les serpents géants dévorés de punaises
Choient, des arbres tordus, avec de noirs parfums!

J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades
Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants.
- Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades
Et d'ineffables vents m'ont ailé par instant.

Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,
La mer dont le sanglot faisait mon roulis doux
Montait vers moi ses fleurs d'ombres aux ventouses jaunes
Et je restais, ainsi qu'une femme à genoux...

Presque île, balottant sur mes bords les querelles
Et les fientes d'oiseaux clabotteurs aux yeux blonds.
Et je voguais lorqu'à travers mes liens frêles
Des noyés descendaient dormir à reculons!

Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,
Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
N'auraient pas repéché la carcasse ivre d'eau;

Libre, fumant, monté de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves d'azur;

Qui courais, taché de lunules électriques,
Planche folle, escorté des hippocampes noirs,
Quand les juillets faisaient couler à coups de trique
Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs;

Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilités bleues,
Je regrette l'Europe aux anciens parapets!

J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur:
- Est-ce en ces nuits sans fond que tu dors et t'exiles,
Million d'oiseaux d'or, ô future vigueur?-

Mais, vrai, j'ai trop pleuré! Les Aubes sont navrantes.
Toute lune est atroce et tout soleil amer:
L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes.
Ô que ma quille éclate ! Ô que j'aille à la mer!

Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache
Noire et froide où vers le crépuscule embaumé
Un enfant accroupi plein de tristesses, lâche
Un bateau frêle comme un papillon de mai.

Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,
Enlever leurs sillages aux porteurs de cotons,
Ni traverser l'orgueil des drapeaux et des flammes,
Ni nager sous les yeux horribles des pontons.


El Barco Ebrio

Al tiempo que bajaba por Ríos impasibles,
Sentí que no me guiaban los hombres a la sirga:
Aullantes Pieles rojas, tomándolos por blanco,
Los clavaron desnudos en postes de colores.

Sin pena me tenían todos los tripulantes:
Portador de algodón inglés, trigo de Flandes...
Cuando acabó aquel ruido a la par que mis hombres,
Me dejaron los Ríos marchar adonde quise.

Entre los chapoteos de la mar encrespada,
Yo, el invierno pasado, más sordo que el cerebro
De los niños, ¡bogaba! Penislas a la vela
Nunca experimentaron barullos más triunfantes.

La tempestad bendijo mi despertar marino.
Más ligero que un corcho bailé sobre las olas
(Eternas trajineras de víctimas las llaman),
¡Sin añorar, diez noches, a las bobas farolas!

Más dulce que manzanas agrillas para un niño,
Traspasó el agua verde mi cascarón de abeto
Y me lavó las manchas de tintorros y vómitos,
Dispersando el timón y el áncora de brazos.

Y desde entonces bogo inmerso en el Poema
De la Mar, infundida de astros y lactescente,
Tragando verdes cielos por donde a veces baja,
Cuerpo arrobado y pálido, un muerto pensativo;

Donde, tiñendo súbitos azules, desvaríos
Y ritmos lentos bajo el rutilante día,
Más fuertes que el alcohol y más que nuestras liras,
¡Fermentan las rojuras amargas del amor!

Sé de cielos que rompen en rayos, y de trombas,
Resacas y corrientes; sé también del ocaso,
Del Alba entusiasmada cual tribu de palomas,
¡He visto varias veces lo que ver cree el hombre!

¡Vi al sol poniente, sucio de místicos horrores,
Iluminando vastos coágulos violetas,
Y, lejos, cual actrices de antiquísimos dramas,
Olas que iban rodando su temblor de postigos!

¡Soñé la verde noche de nieves deslumbradas,
Beso que asciende lento hasta los ojos mismos
Del mar, circulación de savias inauditas,
Y aviso azul y gualda de los cantantes fósforos!

¡He seguido por meses, como a piaras histéricas,
Embates de marea contra los arrecifes,
Sin pensar que los pies de luz de las Marías
Domar pudieran morros asmáticos de Océanos!

¡Créanme que he tocado increíbles Floridas,
Donde ojos de pantera con piel de hombre se mezclan
A flores! ¡Y arco iris bajo el confín marino,
Tensados como bridas para glaucos rebaños!

¡He visto fermentar vastas marismas, nasas
Donde entre las aulagas se pudre un Leviatán!
¡Avalanchas de aguas en medio de bonanzas,
Distancias que se abisman como las cataratas!

¡Soles de plata, heleros, alas de nácar, cielos
De brasa! ¡Horribles pecios engolfados en simas
Donde enormes serpientes, comidas por las chinches,
Caen con negro aroma desde torcidos árboles!

Quisiera haber mostrado a los niños doradas
De agua azul, esos peces de oro que salmodian.
—La espuma en flor meció mis salidas de rada
Y vientos inefables me alaron por instantes.

A veces, mártir harto de polos y de zonas,
La mar cuyo sollozo mi vaivén suavizaba,
Me subía sus flores de amarillas ventosas,
Brunas, y, cual mujer, de hinojos me quedaba...

Península que columpia en sus riberas guano
Y querellas de pájaros chillones de ojos rubios,
Yo navegaba, mientras por mis frágiles zunchos
¡Ahogados con sueño andaban para atrás!

Así, barco perdido entre pelo de ancones,
Lanzado por la tromba en el éter sin aves,
Yo, a quien acorazados o veleros del Hansa
No le hubieran salvado el casco ebrio de agua;

Libre, humeante, envuelto en brumazón violeta,
Yo, que horadaba el cielo rojizo como un muro
Que sostiene, jalea exquisita gustada
Por el poeta, líquenes de sol, muermos de azur;

Que corría empañado de lúnulas eléctricas,
Loca tabla escoltada por negros hipocampos,
Cuando julio derrumba, a grandes garrotazos,
Cielos ultramarinos en ardientes embudos;

Que temblaba al oír, gimiendo en lontananza,
Los Behemots en celo y los densos Maelstroms,
Hilandero perpetuo de quietudes azules,
¡La Europa de los viejos parapetos, yo añoro!

¡He visto siderales archipiélagos, islas
Cuyo cielo en delirio se abre al bogavante!
—¿Son noches abisales en que exiliado duermes,
Oh tú, Vigor futuro, millón de aves de oro?—

¡Cierto: mucho he llorado! El alba es dolorosa.
Toda luna es terrible, y todo sol, amargo.
El agrio amor me hinchó de embriagantes torpores:¡
Que mi quilla reviente! ¡Que me hunda en la mar!

Si algún agua de Europa deseo, ésa es la charca
Negra y fría en la que en tardes perfumadas
Un niño encuclillado, hondo en tristezas, suelta
Un barquito muy frágil, mariposa de mayo...

No puedo, marejada, inmerso en tu apatía,
Escoltar ya el aguaje del barco algodonero,
Ni traspasar orgullos de banderas y grímpolas,
Ni nadar a la vista atroz de los pontones.

Versión de José Luis Rivas y Frédéric-Yves Jeannet

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